Dr Emmanuel BENSIGNOR
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Dermatologie
du chat

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    Particularités et physiologie du pelage du chat, entretien

    1. Le chat est un animal velu, mais qui n’aboie pas. Ce n’est donc pas un chien. On peut logiquement- et à raison- en déduire que son pelage possède certaines particularités, qui nécessiteront un entretien spécifique.

    2. L’espèce féline est composée de nombreuses variétés: poils courts, poils mi-longs, poils longs, poil dense (Persan) ou absent (Sphinx)... Les généralités ne sont donc pas toujours bonnes à prendre.

    3. Le comportement physiologique d’un chat en bonne santé permet de distinguer trois grandes périodes d’activité: le sommeil, le toilettage et ... le reste. Les deux premières activités constituant la très grande majorité du temps, on peut logiquement en déduire, selon qu’on aime ou non cette espèce, que la caractéristique principale du chat est la fainéantise ou la propreté. En se basant sur le second critère, il en découle que dans bon nombre de cas (excepté peut-être pour certains Persans), l’entretien du pelage ne sera pas ressenti par le propriétaire comme une nécessité absolue, ce qui est une erreur.

    Particularités et physiologie du pelage

    Origine
    Les poils sont synthétisés par des invaginations de l’épiderme dans le derme, les follicules pileux. Leur origine est double: ectodermique et mésodermique. Des études chez l’embryon ont montré que la condensation des cellules basales se produisait tôt pour former un bourgeon pilaire, dont la croissance dans le mésoderme s’accompagne de la création de la future papille dermique. La base du bourgeon épithélial entoure progressivement la papille pour former le bulbe pileux. Des renflements apparaissent le long du follicule, ils correspondent à l’insertion du muscle arrecteur du poil, de la glande sudoripare épitrichiale et de la glande sébacée.

    Structure
    Le follicule pileux est composé longitudinalement de trois parties distinctes: l’infundibulum, l’isthme et la partie profonde. On distingue cinq zones différentes: le bulbe pilaire, la tige pilaire, les gaines épithéliales (interne et externe), une membrane basale et une gaine conjonctive. Les cellules pluripotentes de la matrice donnent naissance au poil et à la gaine épithéliale interne. La gaine épithéliale externe représente une extension en profondeur de l’épiderme.
    Le poil sensu stricto ne constitue donc qu’un élément du follicule pileux. Il est composé de trois parties: de l’intérieur vers l’extérieur la médulla, le cortex et la cuticule. La médulla est un cordon de 1 à 3 rangées de cellules longitudinales aplaties de haut en bas. Ces cellules sont solides près de la base, mais le reste du poil contient de l’air et des vacuoles de glycogène. Le cortex est constitué de cellules cornifiées allongées parallèlement au grand axe du poil. Le cortex contient les pigments qui donnent sa couleur au poil. Il représente 1/6ème à 1/4 de l’épaisseur du poil. La cuticule est constituée de cellules aplaties, cornifiées, anucléées, organisées à la façon de tuiles sur un toit.

    Classification
    Le pelage du chat est composé: on distingue des poils primaires (synthétisés par des follicules primaires) et des poils secondaires (synthétisés par des follicules secondaires). Les poils primaires émergent par un pore indépendant alors que les poils secondaires émergent par un pore commun.
    Dans les races à poils courts, les poils primaires mesurent en moyenne 4.5 cm de long, alors que dans les races à poils longs, ces poils mesurent jusqu’à 15 centimètres. Le phénotype court est le phénotype sauvage (L), dominant par rapport au phénotype poil long (l). Il existe des exceptions: dans la race Rex une mutation provoque la formation de poils incurvés, tordus. Chez le Devon les poils primaires sont semblables aux poils secondaires alors que chez le Cornish, les poils primaires sont absents.

    Il existe des poils spécialisés de deux types : les vibrisses et les poils tylotriches. Les vibrisses sont des poils tactiles très développés. Il s’agit de poils primaires comprenant un sinus sanguin en périphérie de la gaine épithéliale externe, limité par des travées conjonctives comportant des plexus sensoriels non myélinisés. Ces poils sont retrouvés sur les joues, les paupières supérieures, les lèvres supérieures et les carpes où ils forment la « glande carpale », constituée d’amas de 5 à 6 poils tactiles. Il s’agit de mécanorécepteurs d’adaptation lente. Leur rôle dans la vie du chat est extrèmement important (déplacements, vie sociale).
    Les poils tylotriches sont disséminés sur l’ensemble du pelage, comme chez le chien. Ces poils fonctionnent comme des mécanorécepteurs d’adaptation rapide.

    Organisation
    Les follicules pileux sont chez le chat, comme chez le chien, groupés. On parle d’ »unités » folliculaires, constituées de 2 à 5 follicules primaires pour 5 à 20 follicules secondaires. Au sein d’une unité folliculaire, le nombre de poils primaires et secondaires varie (en général 1 follicule pileux central primaire, entouré de 2 à 5 follicules pileux primaires latéraux plus petits, eux-mêmes entourés de 6 à 12 follicules secondaires). 12 à 20 poils émergent par le même infundibulum. Les poils secondaires sont très développés chez le chat. On compte environ 10 poils secondaires pour un poil primaire sur le dos et 24 poils secondaires pour un poil primaire sur le ventre. Ceci explique la densité pilaire très importante chez le chat: environ 600 à 1800 poils par centimètre carré.

    Activité
    L’activité des follicules est cyclique: on distingue trois phases (croissance ou anagène, intermédiaire ou catagène, repos ou télogène). L’activité de chaque follicule est indépendante de celle de ses voisins, à l’origine d’une mue en mosaïque. La mue n’est pas affectée par la castration, mais dépend de la photopériode et peut-être de la température ambiante.

    La croissance maximale des poils est observée à la fin du printemps (environ 300 mm par jour), la croissance minimale pendant l’hiver. Les chats d’extérieur muent deux fois par an (au printemps et à l’automne) alors que les chats d’intérieur muent tout le long de l’année. En été, 30% des poils primaires et 50% des poils secondaires sont en phase télogène, alors qu’en hiver, ces pourcentages atteignent 75 et 90%. Dans certaines races (en particulier Rex), une mue partielle ou complète peut être observée à l’occasion d’une gestation ou d’un oestrus et provoquer une alopécie bilatérale et symétrique physiologique.

    Couleur
    Dans l’espèce féline, la couleur de la peau et du pelage est, contrairement au chien, presque exclusivement due à la pigmentation pilaire. En effet, les mélanocytes sont très peu nombreux au niveau de l’épiderme. Ce sont donc les mélanocytes présents dans le bulbe et la gaine épithéliale externe des follicules qui assurent la pigmentation du pelage.
    Le pelage tabby est le type basique, sauvage, à partir duquel de très nombreuses variations ont été sélectionnées. La couleur du pelage est complexe, provenant d’au moins deux groupes différents de gènes.

    La classification des robes est également complexe:

    - robes simples de couleur uniforme
    * à poil uniformément coloré
    * à poil bicolore: robes lièvre, agouti, grise, zibeline, argentée ou fumée

    - robes pluricolores

    Les marques du pelage résultant de l’accentuation de la couleur du poil permettent de distinguer plusieurs modèles de robes :

    - marques de forme allongée: robe tabby
    * tigré ou rayé: selon que les anneaux foncés sont plus ou moins larges et plus ou moins régulièrement répartis.
    * marbré: bandes concentriques sur les flancs en ailes de papillons ou en fer à cheval
    * tacheté: les marques sont ovales

    - présence d’un pelage dépigmenté sur le corps surpigmenté sur les extrémités: colourpoint. Cette coloration particulière résulte d’une activité thermodépendante de la tyrosinase.

    De nombreuses variations existent en fonction des associations de couleurs. Par exemple, la présence de taches blanches est normalement un défaut en exposition mais, limitée aux extrémités est la caractéristique de la race Birmane. La couleur calico est obtenue chez les chats écaille en rajoutant des taches blanches. La présence de l’allèle Maltese provoque une dilution de la couleur normale (noir en bleu, orange en crème).
    Rôles
    Le pelage assure de nombreuses fonctions: régulation thermique, protection contre les agressions, perception sensorielle, organe de communication, esthétique, synthèse de vitamine D dans l’espèce féline.

    Innervation
    Il existe peu de différences avec le chien. Les nerfs efférents du système sympathique innervent les muscles arrecteurs et les cellules myoépithéliales des glandes sudoripares. Des ramifications des nerfs cutanés forment des plexus folliculaires, qui entourent la base des follicules, leur conférant un rôle important de récepteurs tactiles, surtout développé pour les vibrisses et les poils tylotriches.

    Les muscles arrecteurs
    Les muscles arrecteurs permettent la piloérection, et participent peut-être à la vidange sébacée. Ils sont très développés dans l’espèce féline, en particulier au niveau de la région dorso-lombaire, du sacrum et de la queue, où leur diamètre est égal à celui du follicule dont ils dépendent. Ils jouent dans cette localisation un rôle important dans la vie sociale du chat.

    Glandes associées
    Des glandes sébacées et sudoripares épitrichiales sont associées aux follicules pileux. Il n’existe pas de particularité entre le chat et le chien, à part une densité de glandes sudoripares plus faible dans l’espèce féline. Les glandes sébacées sont regroupées au niveau du menton pour former l’organe sous-mentonnier (rôle de reconnaissance par le biais des phéromones), et au niveau de toute la face dorsale de la queue pour former l’organe supra-caudal.


    ENTRETIEN DU PELAGE

    Généralités
    L’entretien du pelage est assuré par des soins locaux (shampooings, brossage, peignage), en assurant une alimentation de bonne qualité en surveillant en particulier l’apport en protéines et en acides gras essentiels, et en prévenant l’apparition des dermatoses, en pratique en limitant les ectoparasitoses.

    Alimentation
    Une nourriture pauvre, mal équilibrée ou carencée conduit souvent à un pelage terne, piqué ou cassant. La fourniture d’une alimentation d’excellente qualité est donc nécessaire pour optimiser la croissance et l’aspect du pelage. En particulier, la source de protéines de la ration doit être controlée. L’utilisation de compléments minéraux et vitaminés spécialement conçus pour la bonne santé de la peau et du poil est parfois bénéfique. Ces produits sont parfois directement incorporés dans l’alimentation industrielle haut de gamme. Les acides gras essentiels représentent probablement un des facteurs les plus utiles à la bonne croissance du pelage. Dans l’espèce féline, les AGE sont l’acide linoléique, l’acide alphalinolénique et l’acide gammalinoléique. Ces substances améliorent l’aspect cutané en s’incorporant dans les membranes cellulaires. Il faut les administrer tous les jours pendant plusieurs semaines avant d’obtenir un résultat probant.

    Nettoyage/brossage
    Les croyances populaires ayant la vie dure, il est rare que les chats soient shampooinés et lavés. Il est vrai que cet animal manifeste une certaine aversion pour le bain. En conséquence l’entretien du pelage du chat est le plus souvent réduit à sa plus simple expression, ce qui est une erreur. En effet, il procure de nombreux bénéfices:
    · amélioration des rapports homme/animal
    · facilitation des contacts et de la manipulation
    · élimination des poils morts (moins de poils sur les moquettes, moins de bourres sur le chat, moins de troubles digestifs)
    · amélioration de la qualité et de l’aspect du pelage
    · détection précoce d’éventuels troubles dermatologiques
    · mise en évidence des ectoparasites

    L’entretien du pelage comprend un nettoyage et un brossage régulier.
    * Les shampooings permettent de nettoyer la peau et les poils, et leur redonnent souvent un aspect brillant et lustré. Certains contiennent en outre des substances réhydratantes ou qui reconstituent le film lipidique superficiel. Les shampooings doivent être adaptés à cette espèce. Certains composants des shampooings pour chiens sont toxiques chez le chat et donc à proscrire (goudron, disulfure de sélénium, ammoniums quaternaires, phénols). Avant le shampooing, il est important d’inspecter la surface cutanée à la recherche de lésions dermatologiques. Dans les races à poils longs, les bourres de poils doivent être coupées et un peignage soigneux doit être effectué avant le shampooing. Certains chats supportent sans problème le fait d’être mouillés, surtout s’ils ont été habitués jeunes et qu’on évite d’ouvrir brutalement le robinet de douche. Pour d’autres, une anesthésie est nécessaire. Il faut scrupuleusement suivre le mode d’emploi, en particulier respecter les temps d’application. Dans les races à poils longs, il est important d’appliquer le shampooing uniformément d’un mouvement régulier uniquement dans la direction du poil. Le rinçage doit être soigneux et durer plusieurs minutes pour éliminer totalement le produit de la peau et des poils, afin d’éviter une ingestion immédiate par l’animal. L’utilisation de démélants est souvent nécessaire dans les races à poils longs. Le séchage doit être réalisé avec une serviette en frictionnant énergiquement le corps. On peut avoir recours au sèche-cheveu en ayant soin de ne pas trop l’approcher des poils (risque de brûlure).
    * Le brossage est utile dans bien des cas. Il est parfois indispensable (dans les races à poils longs par exemple). Il associe un effet démélant à une action mécanique, et permet d’éliminer les poils morts et d’accroitre la circulation sangine (stimulation de la pousse). Il faut utiliser un matériel adapté, qui varie en fonction du type de pelage: brosses, peignes ou étrilles en ayant soin de ne pas abimer la peau. Pour les races à poils courts un peigne à petites dents serrées, pour les races à poils longs un peigne muni de grandes dents conviennent parfaitement. Pour les brosses, les soies naturelles sont préférables aux fibres synthétiques qui produisent de l’électricité statique qui rend les poils cassants.

    Lutte contre les ectoparasites
    La beauté du pelage nécessite également de lutter efficacement contre les ectoparasites (principalement les puces...). Des traitements insecticides réguliers sont indiqués en prévention (cf. conférence du Pr G.Bourdoiseau).

    Cas Particuliers

    Queue d’étalon (stud tail)
    Un état kératoséborrhéique gras est fréquent au niveau de l’organe supracaudal chez les mâles non castrés, mais peut également être observé chez les animaux stérilisés (mâles ou femelles). Il est alors souhaitable lors du shampooing, de traiter séparément cette zone en appliquant un principe actif antiséborrhéique et réhydratant localement. Des applications répétées peuvent être nécessaires.

    Décoloration des poils de la face (Persans)
    Les éleveurs sont très au fait de ce problème, dû à un épiphora excessif. Il s’agit d’ailleurs d’une faute en exposition.

    Bourres de poils
    Mis à part un brossage régulier, dans certains cas une tonte est nécessaire. L’utilisation de poudres (talc par exemple) avant le brossage est également une bonne solution.


    Références
    McDonough S. Grooming. Vet Clin North Am Small Anim Pract, 1995, 25, 767-778.
    Scott D.W. Feline Dermatology 1986 to 1988: looking to the 90’s through the eyes of many cousellors. J Am Anim Hosp Assn, 1990, 26, 515-537.
    Regan L. Grooming longhaired cats. Cat Fancy, 1988, July:20.
    Scott DW. The biology of hair growth and its disturbances. In: Advances in Veterinary Dermatology, vol I, Von Tscharner C and Halliwell REW Edrs, Bailliere Tindall, London, 1990, 3-33.
    Scott DW et al Muller and Kirk’s Small Animal Dermatology, 5th Ed, WB Saunders, Philadelphia, 1995.